conditions de formation
Les dolomies sont généralement le résultat d'un phénomène affectant des sédiments préexistants. La formation primaire de ces roches par dépôt de vases calcomagnésiennes sur les fonds marins est en effet très rare. Cette dolomitisation primaire a été observée dans des plaines côtières basses (golfe Persique), où l'eau de mer pénètre dans une boue calcaire et s'évapore, ou lors de l'arrivée d'eaux riches en carbonate de calcium dans des lagunes où l'évaporation intense favorise les fortes teneurs en sels de magnésium. Par précipitation du gypse CaSO4 · 2H2O, le calcium est soutiré et le magnésium se concentre dans la saumure. Celle-ci réagit avec les sédiments calcaires aragonitiques ; il y a formation de protodolomite, qui est une calcite riche en magnésium, puis recristallisation en dolomite, où les atomes de calcium et de magnésium sont distribués régulièrement. On suppose que la photosynthèse opérée par certaines algues a pu activer ce phénomène, mais on ne connaît pas dans les dépôts marins actuels l'équivalent des dolomies ; on attribue cependant ce mode de formation hypothétique aux dolomies qui apparaissent, dans les terrains sédimentaires, en petits bancs alternant de façon régulière avec des argiles et des roches salines (gypse, anhydrite, sel gemme). La dissolution de ces dolomies par des eaux séléniteuses (ayant circulé sur du gypse) produit des roches d'aspect très irrégulier, avec de nombreuses vacuoles qu'on appelle cargneules. D'autres phénomènes plus localisés de dolomitisation peuvent se produire, surtout dans des roches contenant des squelettes d'animaux qui mobilisent beaucoup de magnésium, comme les coraux.
Le plus souvent, les dolomies sont dues à des actions secondaires, qui remplacent le calcium des boues calcaires, déposées sur les fonds océaniques, par le magnésium contenu dans l'eau de mer. La dolomitisation secondaire se manifeste non plus dans des sédiments, mais dans des roches, sous l'influence de circulations d'eaux ou de vapeurs riches en magnésium. Cette substitution du calcium par le magnésium, qui s'effectue dans des proportions variées, aboutit à la formation de roches intermédiaires entre calcaires et dolomies : les calcaires magnésiens. Dans ces roches, l'on constate que plus la dolomitisation est importante, moins les restes fossiles sont visibles, argument supplémentaire en faveur du remplacement secondaire du calcium par le magnésium. Ces roches sont assez régulières, mais elles ont un aspect massif et homogène dû à la disparition des lits originels. Dans certains cas la transformation peut avoir lieu longtemps après le dépôt, par des solutions magnésiennes circulant dans les cassures des calcaires ; il en résulte des dolomies très irrégulières.
Les processus de dissolution, de création de porosité et de cimentation dans les domaines des carbonates de plate-forme résultent des interactions des processus chimiques, physiques et biologiques souvent associés à des périodes d’émersions. Les réactions sont dirigées par des facteurs intrinsèques à la roche tels que la lithologie, le faciès, la minéralogie, le type de cimentation ou de figures sédimentaires et les microstructures tectoniques, et par des facteurs externes au système calcaire, comme la chimie de l’eau, le climat, l’activité biologique et le régime hydraulique.
Les processus de cimentation précoce sont importants et transforment des sédiments en roches, qui par la suite peuvent être soumis à l’émersion, à la dissolution et à la karstification. L’interaction entre dissolution des grains et des ciments dans un tel contexte déterminera les propriétés des roches et leur évolution au niveau de leur porosité et de leur perméabilité.
Ce mécanisme se met en place au moment où les plates-formes carbonatées émergent et sont soumises à l’altération. Cela revient à étudier ces phénomènes au voisinage des limites de séquence de dépôt.
Nous nous intéresserons également aux phénomènes de dolomitisation. La dolomite est un minéral fréquemment rencontré dans les carbonates de plate-forme, et un des buts de la thèse consistera à analyser les conditions diagénétiques menant à sa formation dans les secteurs étudiés. Ainsi, c’est le cas des plates-formes d’eau peu profonde comme les milieux lagunaires très confinés où l’activité des tapis microbiens peut jouer un rôle déterminant (Vasconcelos et al., 1995). Dans le cas des bordures de plate-forme et dans les zones liées au déplacement de la mixing zone, un type de dolomitisation peut également apparaître (Magaritz et al., 1980). Mais c’est au cours des émersions et des périodes d’intenses évaporation que le processus de dolomitisation peut s‘étendre à de très grandes superficies (Purser et al., 1994). Enfin la dolomie d’enfouissement va également être très présente sur le terrain.
Nous pensons étudier les problèmes de porosité et perméabilité dans une étude détaillée incluant des secteurs situés en Ardèche, dans le Gard et en y incluant des coupes précises dans le Vercors et en Provence.
Dans ces secteurs, nous aborderons d’une part les conditions de formation de dolomie et des problèmes de porosité qu‘elle génère, et d’autre part, nous nous focaliserons surtout sur les processus de dissolution et karstification. A Grenoble nous nous attacherons aux processus diagénétiques et aux expériences de laboratoire sur la dissolution, tandis qu’à Lausanne, l’analyse abordera les problèmes chimiques et géochimiques grâce aux équipements de laboratoire.
Méthodes utilisées
Echantillonnage ciblé sur le terrain pour une caractérisation pétrographique, biologique et diagénétique des échantillons situés sous les limites de séquence ou immédiatement à leur voisinage. Nous n’excluons pas le développement particulier de la dolomie à proximité de certaines structures tectoniques.
Analyses en isotopes stables (O, C) qui aideront à l’identification des fluides mis en jeu. Ces derniers évoluent progressivement lors de l’émersion à partir d’une composante marine dominante vers des fluides de mélange et enfin météoriques. Les proportions de mélange peuvent dépendre de l’amplitude de l’émersion.
Analyses chimiques et minéralogiques qui nous permettront de compléter les données précédentes, lorsque des diagenèses polyphasées ont altéré les phases précoces de dissolution.
Etudes ciblées de dissolution et évaluation des pertes de volume en utilisant le microscope confocal et le MEB.
Modélisation des transformations diagénétiques dans les milieux karstiques, en utilisant les résultats des recherches sur les exemples de terrain et sur les analyses de dissolution menées au laboratoire à Grenoble.